Le passage des muons — 129 ans après Becquerel

Muonographie Noire - Diptyque comparant la plaque de Becquerel 1896 et les 1505 rayons cosmiques capturés en 2025
Muonographie Noire - Diptyque comparant la plaque de Becquerel 1896 et les 1505 rayons cosmiques capturés en 2025

Le 1er mars 1896, Henri Becquerel développe une plaque photographique oubliée dans un tiroir. Elle était enveloppée de papier noir, avec des cristaux d’uranium posés dessus. Le ciel de Paris était couvert depuis plusieurs jours — pas d’expérience possible. Il s’attendait à une image vierge.

La plaque était fortement impressionnée. L’uranium avait émis un rayonnement invisible, dans le noir, sans aucune source d’énergie. Ce jour-là, Becquerel découvrait la radioactivité. Prix Nobel 1903 avec Marie et Pierre Curie.

**129 ans plus tard, j’ai refait l’expérience autrement.**

Le protocole

Mon appareil photo — un Fujifilm GFX 100S de 102 mégapixels — posé dans une pièce noire. Objectif bouché. Aucun photon ne rentre. Le noir absolu.

82 déclenchements. 30 secondes par pose. 41 minutes à photographier le néant.

**Résultat : 1 505 points de lumière.**

Carte des 1505 événements cosmiques détectés - Muonographie Noire
Carte des 1505 événements cosmiques détectés - Muonographie Noire

Ce que sont les muons

Ce ne sont pas des défauts du capteur. Ce sont des **muons** — des particules secondaires créées quand un rayon cosmique primaire (souvent un proton venu d’une supernova) percute notre atmosphère à 15 km d’altitude.

Les muons traversent tout : l’air, les nuages, le toit, les murs. Environ 10 000 muons traversent chaque mètre carré de la surface terrestre chaque minute. Parfois, l’un d’eux traverse un capteur photographique et laisse une trace.

Le plus puissant que j’ai capturé a frappé à **2 544 fois l’intensité du bruit ambiant** — une particule exceptionnellement énergétique, née quelque part dans le cosmos.

Le rayon cosmique le plus intense détecté - 2544 sigma

Les données

| Paramètre | Valeur |
|———–|——–|
| Boîtier | Fujifilm GFX 100S |
| Capteur | 102 mégapixels, moyen format |
| Surface du capteur | 14,4 cm² |
| Nombre de poses | 82 |
| Temps par pose | 30 secondes |
| Durée totale | 41 minutes |
| ISO | 100 |
| Événements détectés (seuil 25σ) | 1 505 |
| Taux | ~37 événements/minute |
| Intensité maximale | 2 544 σ |

1896 — 2025 - le parallèle historique

Le parallèle avec Becquerel est frappant. Même démarche : un détecteur photosensible, le noir absolu, l’attente. Même surprise : l’image qui ne devrait pas exister. En 1896, c’était l’uranium qui émettait. En 2025, ce sont des particules venues de l’espace — nées dans des explosions d’étoiles il y a peut-être des millions d’années. Même question, 129 ans plus tard : que voit un capteur quand il ne voit rien ? On ne peut pas photographier le temps. Mais on peut photographier ce qui se passe quand il passe — même quand personne ne regarde. Chaque point sur cette image est un événement unique. Une particule qui a voyagé depuis l’espace lointain, traversé notre atmosphère, nos murs, et déposé une infime quantité d’énergie sur un pixel de silicium.

Un instant. Une trace. Puis plus rien.

Presse & Contact

Ce projet est disponible pour exposition, publication ou collaboration.

Contact : gabriel@gabrielacoca.fr

Kit presse disponible sur demande (images haute résolution, article technique, données brutes)

Muonographie Noire — Gabriel Acoca — VR360 Productions — Décembre 2025 – Image historique : © Musée Curie (coll. Institut du radium)
Source : [Google Arts & Culture]  (https://artsandculture.google.com/asset/hAGzOeasu2j2MA)